Pour ma soeur, tout sauf lui ( Romy )

Un dimanche comme un autre, une envie comme les autres. L’envie de se ressourcer, se reposer, rejoindre les seules personnes qui vraiment comptaient. Ou en tout cas les seules personnes qui lui rendaient bien, de qui il avait réellement besoin. Sa famille toute entière. Ses sœurs et sa mère. Ce qu’il pouvait les aimer, Adnan, ce qu’il pouvait les choyer, les chouchouter, les protéger. Sans doute un peu trop. Il passait souvent pour le grand frère trop présent, trop derrière leur dos, trop à surveiller leur moindre pas, trop trop trop. Mais il voulait leur éviter des faux pas. Il voulait qu’elles soient heureuses, ses sœurs. Il voulait que personne ne leur brise le cœur. Que personne ne gâche leur bonheur. Ses sœurs. Ses petits bijoux, les filles pour qui il ferait tout. Les femmes sans doute, devrait-il dire mais il a toujours du mal à les voir grandir. Il les voit encore toute petite dans leur chambre à jouer à la poupée, il se voit encore leur lire des histoires sous une lampe de chevet. Il veut pas qu’elle devienne femme, trop vite. Il veut qu’elle profite encore de leur innocence, de leur faiblesse, de la protection qu’il peut leur donner. Et puis sa mère, sa mère toujours presque déprimée. Sa mère jamais réellement remise du départ d’un père. Sa mère qui essaye de vivre malgré tout, malgré ça. Elle aussi, il veut qu’elle soit heureuse. Il l’appelle tous les jours, passe la voir presque tout autant. Juste quelques minutes, juste pour la voir sourire. Ca lui fait chaud au cœur, à Adnan. Mais aujourd’hui, c’était pour ses sœurs qu’il était venu.  Sa mère l’informa que Joséphine était sortie, ne restait plus donc que Romy. Les deux plus jeunes, les deux petites chéries. Il venait souvent les voir dans la maison familiale, le week end. Pour leur rappeler que, malgré son absence de la maison et la prise de son indépendance, il était toujours là pour veiller sur elle. Et surtout, il était là si elles avaient des problèmes. Mais bien fou était celui qui cherchait des problèmes à ses sœurs, tout le monde savait très bien qui se cachait derrière elle, partout et nul part à la fois.
« Mais Aaron arrête … Oui on va se voir je te dis ! » Aaron. Le sang qui ne fait qu’un tour. La tête bouillante, les mains qui deviennent brusques, durs, qui veulent tout casser, tout envoyer balader. Derrière la porte de la chambre de sa petite sœur, Adnan espère qu’on lui joue un mauvais tour, ce genre de blague qui fait pas vraiment rire, mais qui rassure quand on sait que ce n’était que ça, qu’une blague. Il attend qu’elle ait fini son appel parce qu’il ne veut pas la déranger mais y’a sa tête qui bouillonne à cette simple pensée : Aaron et sa sœur. Fallait commencer se demander si Aaron voulait pas se rapprocher de toutes les filles qu’aimaient Adnan. Sœur, amour d’une vie. Ca risquait pas d’être très bien prix. Il le savait, à quoi il jouait ? « Hey Romy chérie.  » Il rentre, l’embrasse sur les deux joues d’un air tendre. Il regarde autour de lui, rien n’a change dans sa chambre. Il peut pas croire qu’aaron ait pu foutre les pieds ici, il espère que c’est qu’un ami, un simple ami. Et même en pensant ça, ça le rassure pas. « Depuis quand tu connais Aaron ? J’croyais que tu l’aimais pas, avec toutes ces histoires, je croyais que t’étais … De mon côté. Dis moi que c'est pas lui, que c'est pas vrai. » Y’avait pas de bon ou de mauvais côté. Y’avait juste une incompréhension. Pourquoi elle lui parlait ? Pourquoi ils s’appelaient ? Pourquoi son regard trahissait autre chose que de l’amitié ? Pourquoi lui ? Faut croire que tout s’acharnait. Calme devant sa soeur, fallait bien qu'il essaye de le rester.

Dimanche, Romy adorait les dimanches qui étaient synonyme pour elle de glandage. Étant une glandeuse professionnelle, elle avait déterminée que les dimanches servaient à ça. Ouais bon, en réalité elle ne glandait pas toute la journée ayant toujours mille et une choses à faire et des idées plein la tête. Enfermée dans sa chambre, elle profitait de ce moment de solitude pour écouter de la musique et prendre du temps uniquement pour elle. Elle n'arrêtait pas de se repasser en boucle le cd d'Hozier laissant pianoter ses doigts fins de sa main gauche, contre son ventre où elle pouvait sentir sa respiration. Moment de détente, un véritable paradis qui ne dura pas, puisque son portable vibra sur sa table de nuit. Grognant légèrement elle se redressa et s'empara de celui-ci regardant qui l'appelait, puis elle eut un petit sourire en coin et elle décrocha sans hésitation. Tout en engageant la conversation, elle vint à fermer un peu plus sa porte par réflexe, bien que toutes les membres de la famille étaient sortis. « Mais Aaron arrête … Oui on va se voir je te dis ! » Puis voilà, que tout se passe rapidement elle a juste le temps de raccrocher et de laisser son portable s'échouer sur son lit que son frère est là, comme un fantôme il se faufile partout et se présente lorsqu'on ne s'y attend pas. « Hey Romy chérie.  » Elle sourit doucement, alors qu'il vient l'embrasser tendrement sur les joues, puis doucement son sourire disparaît lorsqu'elle l'entend reprendre la parole et parler d'Aaron. « Depuis quand tu connais Aaron ? » La jeune femme tente de demeurer calme à son tour, un rire s'échappe de ses lèvres et elle penche la tête légèrement sur le côté pour plonger ses yeux dans les siens quelques secondes et dire finalement; « Adnan, je connais Aaron depuis un moment, après tout à Lyons ont fini par connaître pas mal de gens.» Puis voilà, qu'il enchaîne et Romy a l'impression de perdre un peu patience et ses yeux se plissent légèrement et ses sourcils se froncent au fil de ces mots; «J’croyais que tu l’aimais pas, avec toutes ces histoires, je croyais que t’étais … De mon côté. Dis moi que c'est pas lui, que c'est pas vrai. » Agacée, la jeune femme se sentait traquée comme un animal et elle avait l'impression qu'elle allait devoir choisir entre son frère et Aaron, c'est ridicule non? « T'es pas sérieux là Ad', c'est quoi, t'es entrain de me demander de choisir c'est ça?» Tirant une grimace, la jeune femme détourna les yeux un moment pour tenter de se recentrer et elle reprit la parole en encrant son regard clair dans celui de son frère. « Je l'aime pas non plus, du moins pas comme tu le penses. Sérieusement, j'suis dégoûté par ton attitude...  Est-ce que je te demande de choisir entre Cassandre et moi? J'crois pas, alors qu'on sait que cette fille-là elle te fait plus de mal qu'autre chose.» Ses mots sont tranchants, elle n'a pas envie de s'engueuler, mais en même temps c'est plus fort qu'elle. Romy n'a plus envie de se faire traiter comme une enfant, comme une petite fille de dix ans.

La famille, c’était sans doute l’une des choses de sa vie les plus importantes. Il aimait sa mère plus que tout au monde. Il l’avait soutenue quand leur père était parti, il avait été là pour la relever, pour l’aider à surmonter. Déprimée, elle avait besoin d’aide, et Adnan et sa jumelle avaient été là pour qu’elle reprenne normalement sa vie. Aujourd’hui encore, il lui arrivait d’aller mal et aujourd’hui encore, il était là pour elle. S’il passait presque tous les jours à l’heure du midi il ne voyait pas très souvent ses sœurs qui étaient souvent parties, en cours ou avec leurs copines. Le dimanche c’était donc l’occasion de les retrouver toutes les deux, même si la plus petite Joséphine n’était pas là aujourd’hui. De qui était-il le plus proche entre ses deux petites sœurs ? Il ne savait pas vraiment. Cela dépendait des jours. Joséphine se confiait beaucoup à lui, s’appuyait beaucoup sur lui. Mais son envie récente de retrouver leur père l’avait foutu en rogne, Adnan. Il ne voulait pas qu’elle le retrouve, lui qui les avaient abandonnés lâchement, sans regarder en arrière. Avec Romy, c’était différent. Il l’aimait énormément, partageait avec elle une passion pour la photographie. Ca les avait rapprochés, soudés. Mais Romy, elle voulait sa liberté. Romy elle avait vingt ans et elle en avait assez d’être vue comme une petite fille, Romy elle voulait qu’Adnan la laisse tranquille, et ce n’était malheureusement pas là d’arriver. Surtout s’il s’agissait d’Aaron, Aaron qu’il détestait, qu’il haïssait, qu’il ne pouvait plus supporter.   « Me semble pas que Lyon ça soit la ville la plus petite du monde, mais j’vais finir par croire qu’il me suit ou plutôt qu’il suit les filles importantes dans ma vie. Y’en a plein à Lyon non ? Comme s’il pouvait pas aller voir ailleurs si j’y suis. » Adnan allait devenir fou s’il apprenait un jour qu’il se passait quoi que ce soit de plus entre Aaron et sa sœur. Pour lui, puis pour Cassie aussi. Elle avait eu sa dose des hommes qui couchaient avec tout le monde et pourtant, Aaron faisait partie de la même lignée, de ceux incapables de se poser, de résister.  Beaucoup de filles trop jolies, il parait. Mais il faisait comment Adnan pour pas toutes les sauter ? C’était pas obligatoire, quand on connaissait le respect, quand on voyait les femmes autrement que comme des corps à gouter. Surtout Adnan, il pouvait pas imaginer ça avec sa petite cœur, ça lui faisait comme un haut le cœur. .   « Parle pas de Cassie.  » Il lui répond, du tac au tac. Il savait bien ce que Romy pensait d’elle et c’était exactement pour ça qu’il ne voulait pas en parler avec elle. Sa Cassie. Que personne la touche, que personne ne dise du mal d’elle. Ce qui se passait entre eux ne regardait qu’eux, justement. Elle pourrait sans doute dire la même chose de la relation qu’elle entretenait avec Aaron mais selon Adnan, ce n’était ni comparable ni envisageable que sa sœur vive quoi que ce soit avec lui. « Attends .. T’es en train de comparer la relation que j’ai avec elle à celle que t’as avec lui ? J’suis censé comprendre quoi avec ça ?  »  Rester calme, c’était plutôt difficile dès qu’il s’agissait de ce mec. Et dès qu’il s’agissait de sa petite sœur et d’un mec. Alors les deux, c’était comme le champ de bataille dans sa tête. « Dégoutée dégoutée .. Tu crois que j’suis pas dégouté de savoir que tu traines avec ce genre de mecs qui pensent qu’à ...  » Baiser. Mais il n’avait pas fini sa phrase, devant les yeux consternés de sa petite sœur. Il se retient avant que ça éclate, mais il se demande bien ce qu’elle foutait avec lui.

« Me semble pas que Lyon ça soit la ville la plus petite du monde, mais j’vais finir par croire qu’il me suit ou plutôt qu’il suit les filles importantes dans ma vie. Y’en a plein à Lyon non ? Comme s’il pouvait pas aller voir ailleurs si j’y suis. » Un soupir franchit les lèvres de la jeune femme, sincèrement est-ce qu'il prenait au moins conscience de ce qu'il disait, c'était à se demander s'il ne souhaitait pas l'enfermer pour l'empêcher que des gens l'approchent de trop près, plutôt des garçons parce qu'au final c'était ça le problème. Dangereusement, la belle brune évoque le sujet de Cassandra, Romy sait très bien qu'elle s'engage sur un terrain glissant, mais de nature impulsive elle ne contrôle pas toujours ses paroles lorsqu'elle se sent attaquée d'un peu partout, lorsqu'elle est contrariée et agacée. Évidemment, il lui le fait clairement savoir que c'est un sujet a évité et Romy peut sentir dans son regard qu'il n'apprécie pas cela, qu'il est agacé lui aussi. La tension monte et voilà qu'il prend de nouveau la parole;  «Attends .. T’es en train de comparer la relation que j’ai avec elle à celle que t’as avec lui ? J’suis censé comprendre quoi avec ça ?  » Doucement, la jeune femme fait légèrement une grimace effectivement il ne semble pas comprendre et la demoiselle n'a pas le temps de s'expliquer qu'il enchaîne encore une fois; « Dégoutée dégoutée .. Tu crois que j’suis pas dégouté de savoir que tu traines avec ce genre de mecs qui pensent qu’à ...  » Le visage de la jeune femme se transforme à ces mots, son regard est soudainement plus dur, elle croise les bras contre sa poitrine et répond pour lui, elle répond le mot qu'il n'a pas osé prononcer, mais qu'elle savait très bien où il voulait en venir. « Baiser?» Doucement, la jeune femme poursuit en disant; « Merci de te soucier de ma vie sexuelle Adnan, ça me touche...» Elle lâche un petit rire exaspéré, puis une grimace se dessine une nouvelle fois sur son visage et elle plonge son regard dans le sien soutenant son regard; « Tu penses que j'ai pas assez de jugement, que j'ouvre mes jambes comme ça?» S'humectant doucement les lèvres elle continue; « Est-ce que je me mêle de tes relations, des filles que tu voies et avec lesquelles tu couches? Non, je te laisse de l'air et c'est ce que tu devrais faire me laisser de l'air pour respirer, parce que j'vais vraiment finir par étouffer.» Finalement, elle maintien encore son regard quelques secondes, pour quitter la pièce et descendre à l'étage ayant besoin de ventiler un peu. Elle sait pertinemment qu'il fait tout ça parce qu'il tient à elle, qu'il ne veut pas que rien lui arrive, mais parfois ça commence à devenir lourd et envahissant, terriblement envahissant.